Pour de bonnes raisons, les souvenirs de traumatismes sont très chargés et se rappellent facilement. Il s’agit d’une réaction d’adaptation qui permet de détecter les traumatismes futurs et de s’en protéger.
Par exemple, si une personne a été attaquée par un tigre, elle sera très attentive à tout ce qui pourrait être un tigre. Si la personne entre dans une pièce où se trouve un tapis orange, cela peut déclencher une perception de danger. La personne peut avoir le cœur qui s’emballe, une respiration superficielle et un sentiment de peur intense. Logiquement, il n’y a pas de danger. La personne sait que le tapis orange n’est pas dangereux. Cependant, il branche un réseau neuronal activant des souvenirs d’expériences de mort imminente, et la personne réagit comme si elle était confrontée à un danger extrême et écrasant.
De même, une certaine odeur, une certaine vue ou un certain son – ou le fait de se trouver dans certains endroits ou en présence de certains types de personnes – peuvent déclencher un réseau neuronal traumatique et évoquer la même réaction de peur d’un danger imminent.
La stratégie COPE peut être utilisée pour aider une personne à revenir à l’instant présent, à respirer, à s’ancrer dans la réalité et à se rassurer sur sa sécurité. COPE est l’acronyme de « COPE » :
- Respiration purificatrice(inspirer profondément par le nez et expirer en soupirant)
- Observation(analyse de l’environnement, observation de ses propres réactions)
- Monologue intérieur positif(je vais bien, ça va passer)
- Explication(il s’agit seulement d’un déclencheur)
Le COPE est efficace pour aider une personne à se calmer à la suite d’un déclencheur, d’une pensée intrusive ou d’un accès soudain d’anxiété. Avec la pratique, la réaction de peur commencera à raccourcir en durée, à diminuer en intensité et peut même se produire moins fréquemment.
Cependant, le réseau neuronal reste intact. Alors, comment faire pour modifier le réseau d’associations, en particulier dans le cas d’expériences émotionnelles très intenses ?
Tout d’abord, examinons comment ces réseaux se forment. Comme nous l’avons vu dans l’article précédent, l’apprentissage se fait en reliant les informations dans des réseaux. Un réseau plus développé et plus complexe permet un apprentissage profond ou nuancé. De nouvelles expériences peuvent renforcer l’apprentissage, ce qui peut consolider un réseau existant, ou une nouvelle expérience qui ne correspond pas à l’ancien modèle peut entraîner des changements, des exceptions, de nouvelles branches ou d’autres altérations du réseau original.
En d’autres termes, les réseaux neuronaux sont formés, entretenus et modifiés par l’expérience. Il s’agit d’un modèle d’apprentissage qui fait référence à une vaste réserve de souvenirs (matériel appris) et qui interagit simultanément avec de nouvelles expériences au quotidien. Par souci d’efficacité, nous avons tendance à ignorer un grand nombre d’informations et à les regrouper au sein de réseaux existants. Nous utilisons divers raccourcis cognitifs appelés heuristiques pour nous aider à généraliser et à traiter l’information plus efficacement.
L’une des heuristiques que nous utilisons est ce que j’appelle les hologrammes expérientiels (voir Katz, 2005). Les hologrammes expérientiels sont formés par l’expérience et deviennent un filtre ou une lentille à travers laquelle nous anticipons, supposons, interprétons et réagissons à la vie (nous reviendrons sur les hologrammes expérientiels dans de prochains articles). Nous avons des attentes sur la façon dont les choses se dérouleront dans le futur en fonction de la façon dont elles se sont déroulées dans le passé. Par conséquent, nous réagissons à nos perceptions du présent, mais celles-ci sont filtrées par nos expériences passées.
Pour en revenir à la personne qui est entrée dans une pièce où se trouvait un tapis orange, elle réagissait aux images d’un tigre attaquant dans le passé, et pas nécessairement au tapis dans le présent. Ainsi, nos hologrammes, bien qu’efficaces, nous font réagir par rapport à des expériences passées. Je demande à mes élèves : « À quoi ressemble votre avenir si vous réagissez en fonction du passé ? À quoi ressemble l’avenir si vous êtes pleinement dans le présent ? »
Pour modifier un réseau neuronal, un nouvel apprentissage doit avoir lieu. Lorsque nous nous concentrons sur l’apprentissage expérientiel ou émotionnel, l’apprentissage doit impliquer le système émotionnel. En d’autres termes, la logique en elle-même ne modifie pas un réseau traumatique. La personne qui se tient sur le tapis orange sait logiquement qu’il n’y a pas de danger, ce n’est qu’un tapis. Mais le système émotionnel réagit aux images du passé. La personne peut utiliser COPE pour calmer le système nerveux, mais le réseau reste intact.
Il existe de nombreuses façons d’engager l’apprentissage émotionnel, telles que de nouvelles expériences émotionnellement dérangeantes, des connaissances qui modifient la perception au niveau émotionnel et l’utilisation d’images pour induire une nouvelle expérience émotionnelle.
Défi quotidien : Réagissez-vous au présent ou au passé ? La prochaine fois que vous vous apercevrez que vous vivez une expérience émotionnelle, posez-vous la question suivante : « Cette situation actuelle me rappelle-t-elle quelque chose de mon passé ? Cette émotion me rappelle-t-elle une série de souvenirs ? » Si vous réagissez à quelque chose du passé, comment pouvez-vous améliorer la situation cette fois-ci ? La vie offre des occasions de pratiquer de nouvelles réponses et, par conséquent, de rescinder (réécrire) les anciens schémas.
Références
Katz, L. (2005). Holographic Reprocessing : A cognitive-experiential psychotherapy for the treatment of trauma. Brunner-Routledge, New York.