Nous sommes notre cerveau, et pourtant…

  • La recherche sur le cerveau rend la psychologie plus impressionnante. Mais savoir exactement où se déroule l’activité cérébrale ne nous aide pas à mieux comprendre les gens.
  • C’est comme étudier le fonctionnement d’une entreprise en regardant de l’extérieur, là où les lumières sont allumées. Cela vous permet de savoir où se passe l’action, mais vous n’êtes pas à l’intérieur.
  • Notre cerveau n’est pas responsable de ce que nous faisons : Nous sommes notre cerveau et nous pouvons renforcer les voies neurologiques par ce que nous faisons.

Au lycée, en biologie, nous avons appris à identifier une plante. C’était beaucoup de travail et je n’en voyais pas l’intérêt. Les plantes et les fleurs sont belles. Qui se soucie de leur nom ?

Je détestais l’école. Je ne faisais jamais mes devoirs. J’ai fini par m’en sortir. Mais ce vieux sentiment de « et alors ? » me frappe encore parfois, par exemple lors d’une conférence sur les émotions. J’attendais avec impatience les présentations sur les études IRMf, qui montrent où « ça » se passe dans le cerveau. Je me suis dit que cela nous permettrait de mieux comprendre ce que sont les émotions et comment elles fonctionnent. J’ai regardé des scientifiques ravis de présenter de belles images de zones du cerveau qui s’illuminaient lorsque les gens étaient en colère ou effrayés.

Mais après chaque présentation, je ne me sentais pas à l’aise. Je savais donc maintenant « où ça se passait ». Est-ce que je comprenais mieux les émotions ? Pas vraiment.

Neuro-jabber absurde

Plus tard, j’ai lu l’interview d’un chercheur qui disait que la recherche sur l’IRMf, c’est comme étudier le fonctionnement d’une entreprise en regardant de l’extérieur quelles lumières sont allumées dans quelles salles de bureau. Cela vous indique où se situe l’action, mais vous ne savez pas vraiment ce qui se passe à l’intérieur et pourquoi. Vous n’êtes pas à l’intérieur, vous ne pouvez pas voir ce que font les gens, vous ne pouvez pas assister aux réunions. En fait, vous ne savez rien.

Mais il est très objectif et fiable. Et c’est impressionnant : Les gens considèrent les résultats de la recherche – même les faux résultats avec des non-sens – comme plus crédibles lorsqu’ils sont accompagnés d’un jargon neurologique intéressant ou d’images de scanners cérébraux. Des processus psychologiques flous et invisibles acquièrent soudain une forme et un contenu. Si l’on peut localiser un processus dans le cerveau, c’est qu’il est réel, ou du moins c’est ce que l’on croit.

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La recherche sur le cerveau rend la psychologie plus exacte et plus tangible. De nombreuses personnes ont acheté des livres sur la façon dont notre cerveau affecte tout ce que nous faisons. Pensez par exemple aux recherches qui montrent l’activité cérébrale avant que vous ne preniez une décision : les IRMf suggèrent que le cerveau a déjà fait un choix avant que vous n’en soyez conscient. C’est comme si le cerveau savait déjà, et que vous ayez l’illusion de vous choisir vous-même.

Ces résultats ont été interprétés comme un argument en faveur de l’absence de libre arbitre: C’est le cerveau qui commande. Mais, bonjour, de quel cerveau s’agit-il ? Si c’est votre propre cerveau, alors c’est vous, n’est-ce pas ? Mon collègue Daniel Wigboldus l’a très bien expliqué : « Lorsque je prends une décision, je peux espérer qu’un certain degré d’activité cérébrale l’a précédée ».

Comment nous influençons notre cerveau

Savoir exactement où se déroule cette activité ne nous aide pas à gérer nos émotions ou à prendre de meilleures décisions. Mais savez-vous ce qui peut nous aider ? Une découverte bien plus fascinante issue de la recherche sur le cerveau : Nos fonctions cérébrales se développent et s’adaptent en permanence à ce que nous faisons et à ce que nous vivons. En effet, nous sommes notre cerveau. Le cerveau ne « détermine » donc pas ce que nous faisons, pensons et ressentons ; il est ce que nous faisons, pensons et ressentons, et il en est également affecté. Le cerveau renforce les connexions que nous utilisons souvent, tandis que les routes que nous n’empruntons jamais dégénèrent, à l’instar des chemins de forêt, qui s’élargissent ou se rétrécissent en fonction de la fréquence à laquelle ils sont parcourus.

Voilà ce que je trouve intéressant : tout ce que nous faisons – nos choix, nos interactions, nos habitudes – affecte notre cerveau. Si j’avais fait plus d’efforts à l’école, j’aurais pu avoir un don pour la biologie maintenant.