Points clés
- Trois émotions négatives primaires (anxiété, dépression, hostilité) sont acquises, mais la quatrième, la peur, est évolutive.
- L’humeur est un état émotionnel transitoire, mais elle affecte la santé et le fonctionnement mentaux si elle est chronique et intense.
- L’anxiété est conditionnée de manière classique et évitée de manière instrumentale, en associant l’esprit, le cerveau et la culture. Il s’agit du célèbre modèle d’apprentissage « à deux facteurs ».
- La fréquence préalable des simulations de répétition (pratiques, sur-apprentissage) réduit l’anxiété et la peur à un niveau gérable en temps réel.
L’existence des émotions facilite l’autorégulation et, bien qu’elles soient désagréables à vivre, elles sont nécessaires à la qualité de vie et à la survie.
Une utopie est un monde à votre goût qui réduit le besoin de varier les émotions. Une dystopie, c’est tout le contraire : toujours dans la peur, la dépression, l’agitation. Cependant, de nombreuses raisons pratiques empêchent une liberté personnelle totale et un contrôle externe, faisant de l’expérience de ces émotions une réalité de la vie.
États ou traits de caractère
Considérez les émotions négatives comme des états à l’intérieur de traits de caractère plus marqués et plus globaux. Par exemple, une personne habituellement facile à vivre peut être hostile. Une personne optimiste peut être déprimée. Une personne curieuse peut se sentir anxieuse à l’idée d’essayer quelque chose de nouveau. Avec le temps, les déclencheurs et les relations de cause à effet s’accumulent jusqu’à ce que l’on sache mieux ce qu’il faut faire ou éviter.
La sagesse devient le nom de ces idées sur la meilleure façon de mener une vie pleine de sens et d’objectifs. Quels sont ces états d’âme (négatifs) dont nous devons faire l’expérience pour mûrir ?
Aperçu des états d’âme
L’anxiété (A) est le fait d’avoir peur, d’être effrayé, de trembler et d’être tendu. La dépression (D) est le fait de se sentir seul, délaissé, perdu et malheureux. L’hostilité (H) est le fait de se sentir agacé, contrarié, désagréable. La peur (F) est une excitation autonome qui cherche à échapper à l’objet ou à la situation. C’est la lutte ou la fuite.
Les trois premières émotions négatives (A, D, H) sont acquises. La peur est innée et évolutive pour la survie de l’espèce. Ces émotions négatives primaires fluctuent autour d’une personnalité plus stable.
Nous avons tous des déclencheurs pour A, D, H et F.
Chacun a un « déclencheur » qui génère un A, un D, un H ou un F. Ce déclencheur forme l’identité et la perception que les autres ont de nous. Nous gardons nos états d’âme pour nous. Lors de salutations sociales ordinaires telles que « Comment vas-tu ? », votre réponse est basée sur le trait et non sur l’état – « Bien » – même si, à ce moment précis, vous êtes déprimé. On ne dit pas « Je suis déprimé » dans une conversation polie. La question est une manière de répondre à une situation.
Ces émotions négatives acquises, y compris la recherche de sensations – untrait biologique reliant l’anxiété acquise et la peur évolutive – peuvent être mesurées empiriquement à l’aide d’échelles psychométriques telles que la MAACL-R (Multiple Affect Adjective Checklist).
Les psychologues peuvent attribuer un numéro à un sentiment pour mieux vous aider. Dans ma pratique, je mesure les humeurs, par exemple en utilisant l’inventaire de dépression de Beck (BDI) pour dépister les dépressions réactives et endogènes.
Le rôle de l’apprentissage dans l’humeur
Les changements positifs et négatifs sont acquis par l’apprentissage classique et instrumental – théorie des deux facteurs – mais les différents états mentaux s’entremêlent avec les autres émotions négatives (et positives), ce qui fait qu’une humeur négative est souvent passagère. Si l’état négatif persiste et s’intensifie, on parle de psychologie anormale si l’on ne peut pas se concentrer ou fonctionner.
Si vous avez de bonnes nouvelles, tout va soudain bien, et c’est l’inverse qui se produit.
Examinons maintenant de plus près chacun de ces états mentaux et la manière dont ils interagissent.
Anxiété
L’expérience de l’anxiété est aversive. Nous agissons différemment pour en réduire l’intensité ou nous nous automédicamentons(alcool, herbe, pilules) ou nous nous soignons (médicaments psychotropes prescrits) dans l’espoir de réduire ou d’éradiquer la mauvaise humeur.
Le problème est que la « mauvaise humeur » peut stimuler l’imagination créatrice, ce qui signifie que les artistes créent de l’anxiété pour réduire l’anxiété par le biais de leur art. Je suppose que Pablo Picasso n’a pas créé « Guernica » sur les horreurs de la guerre civile espagnole de bonne humeur.
Si l’anxiété n’est pas traitée, elle génère une phobie ou une réaction d’évitement active pour faire face à la « distraction ». Pour réduire l’anxiété, cette réaction d’évitement et de fuite ne tient pas compte des facteurs de stress et ne fait qu’aggraver la situation. C’est pourquoi, dans la psychopathologie classique, le« névrosisme » s’autodétruit.
Phobies et programmes de récompense
Une phobie, un trouble anxieux, est classiquement conditionnée et évitée de manière instrumentale par les quatre schémas de récompense skinnériens : Intervalle fixe, intervalle variable, ratio fixe et ratio variable.
Une phobie à ratio variable est très résistante à l’extinction. Un bon exemple est celui d’une machine à sous dans un casino. Les récompenses sont payantes « de temps en temps », vous restez donc assis pour jouer.
Les machines à sous sont la principale source d’argent pour le casino. Une récompense à intervalle fixe est un chèque bimensuel.
Les entrepreneurs sont des chefs d’entreprise qui recherchent des récompenses à ratio variable élevé et sont à la base du capitalisme. Ils évitent (et trouvent ennuyeux) une récompense à intervalle fixe (appelée emploi). Il existe des preneurs de risques et des personnes qui recherchent des sensations fortes, un autre état d’esprit.
Les phobies et le modèle à deux facteurs
Le modèle d’apprentissage « à deux facteurs » a été initialement avancé par H.O. Mowrer. La peur est conditionnée de manière classique et évitée de manière instrumentale en reliant l’esprit au cortex moteur.
Nous faisons des choses pour réduire l’anxiété. Que ce choix soit licite ou illicite n’est pas pertinent, il est défini par la culture, les normes, les codes de conduite, le droit et la justice.
Une société en formation devient une société lorsqu’elle attribue une valeur morale et éthique à certaines préférences par rapport à d’autres, et si elle s’universalise, elle forme une civilisation.
Dépression
La dépression ne consiste pas à penser ou à agir puisqu’il y a un pessimisme quant aux résultats qui culmine dans l’impuissance apprise ou « peu importe ce que je fais, cela n’a pas d’importance ». Cette attitude mentale est dysfonctionnelle (et dangereuse) si elle aboutit au désespoir.
Il existe deux principaux types de dépression : la dépression réactive (situationnelle, acquise) et la dépression endogène (biochimique, génétique). La dépression réactive est une déception face à un événement réel, comme le fait de ne pas être admis dans une école ou d’être rejeté en amour. Vous vous refermez sur vous-même. Ce repli sur soi ou cette diminution des activités – un retrait de la pensée et de l’action – est temporairement adaptatif et constitue une mesure de la résilience future. Tout le monde éprouve ces sentiments tôt ou tard.
La dépression endogène est plus sévère et biochimique, affectant la neurochimie. La cause et l’effet ne sont pas clairs. La TCC modifie la neurochimie, mais les médicaments psychotropes modifient la pensée dans une boucle de rétroaction. Par exemple, le Prozac®, un médicament contre la dépression, empêche la recapture de la sérotonine, ce qui signifie qu’une plus grande quantité de ce neurotransmetteur se trouve dans votre tête, rééquilibrant ainsi la neurochimie. Certaines dépressions biologiques sont héréditaires, en particulier la maniaco-dépression, les troubles bipolaires, les sautes d’humeur soudaines et intenses, et il est donc important de connaître les antécédents génétiques de sa famille.
Le deuil n’est pas une dépression
Ne confondez pas la dépression réactive avec le deuil ou la tristesse normale après une perte. Les cinq étapes du deuil sont le chemin du retour à la résilience. L’expérience du deuil est un mal nécessaire pour enseigner l’empathie.
Hostilité
Un autre état émotionnel est l’hostilité. Avez-vous déjà été maltraité ou bloqué dans un embouteillage ? De nombreuses nouvelles applications permettent d’atténuer la haine, la colère et d’autres états d’âme négatifs. La clé est d’apprendre à se maîtriser.
Nous nous sentons hostiles lorsqu’un objectif est bloqué en raison de notre frustration ou si les autres ne sont pas d’accord avec nous. L’hostilité peut conduire au repli sur soi ou à la rage agressive, selon la manière dont nous avons été socialisés pour faire face à la déception. La violence domestique est un état d’esprit hostile (contrôler l’autre pour faire face au stress).
L’hostilité préoccupe davantage votre pensée que l’anxiété, ce qui fait de vous un parent, un conjoint ou un manager médiocre. L’hostilité interfère également avec la pensée créative et critique.
La peur
La peur est la réaction évolutive de lutte ou de fuite. Elle comprend la conviction qu’il existe une menace immédiate. La cognition, étant interprétative, nous rend plus conscients du danger, qu’il existe ou non, ce qui aboutit à la paranoïa ou à une sensibilité excessive aux personnes, aux lieux et aux circonstances.
Les animaux « sentent » littéralement la peur humaine grâce aux corticostéroïdes, à l’adrénaline et au cortisol présents dans la sueur de notre peau. Il s’agit d’un détecteur de danger de proximité par opposition à un récepteur de distance comme la vision ou l’audition. Les hommes politiques promettent de réduire la peur (l’anxiété omniprésente) pour se faire élire.
L’humeur modifie la génétique, la neurochimie et le sport
Une menace perçue est réelle ou imaginaire, généralement acquise à la suite d’une expérience négative intense, mais certaines personnes naissent ou héritent d’un besoin biologique de A, D et H plus élevés.
Les joueurs de tennis qui frappent leur raquette modulent leur neurochimie, passant d’un état d’excitation hostile à un état d’excitation anxieuse. Le profane n’a aucune idée de ce qui se passe, et même les commentateurs sportifs jubilent en disant : « Il est en train de perdre la tête ». L’autorégulation est en jeu et constitue une différence individuelle. John McEnroe, après une altercation verbale avec l’arbitre de chaise, jouait mieux. Il s’est calmé. Curieusement, pour Novak Djokovic, un joueur de tennis de haut niveau, les vociférations et les coups d’éclat ne lui rendent pas service, car ils interrompent le flux et nuisent au jeu.
Est-ce que j’ai besoin d’un conseiller pour être aussi lunatique ?
La durée et l’intensité déterminent si une humeur négative nécessite des soins professionnels. Vous pourriez avoir besoin de conseils professionnels si une anxiété prolongée conduit à l’angoisse, une dépression intense au désespoir et une hostilité prolongée à l’animosité.
Références
Zuckerman, M., Lubin, B, et Rinck, M. (1983) Construction of New Scales for the Multiple Affect Adjective Check List. Journal of Behavioral Assessment. Vol. 5 No. 2.
Feather, N.T. (1963) Mowrer’s revised two-factor theory and the motive-expectancy value model. Psychological Review 70, (6), 500-515