Selon l’ Association pour la prévention de l’obésité chez les animaux de compagnie, il y a énormément de chiens obèses en Amérique du Nord. En mars 2019, l’association a publié les résultats de son enquête la plus récente, basée sur l’évaluation de 1 560 chiens recueillis dans 146 cliniques vétérinaires et représentant 41 États américains. Selon les résultats, 36,9 pour cent des chiens ont été classés en surpoids et 18,9 pour cent en obésité. Cela signifie que 55,8 % des chiens américains sont trop lourds.
Comme chez l’homme, le surpoids ou l’obésité n’est pas seulement un problème esthétique, mais tend à prédisposer les individus à un grand nombre de problèmes de santé. Ces problèmes comprennent l’arthrite, le diabète, l’hypertension, les maladies du foie, les difficultés respiratoires, un système immunitaire moins performant et une prédisposition à certains types de tumeurs cancéreuses. Globalement, les chiens en surpoids ont une espérance de vie réduite.
Compte tenu des conséquences désastreuses subies par les chiens corpulents, il n’est pas surprenant que les chercheurs mènent des études pour voir s’ils peuvent isoler les facteurs communs qui semblent augmenter le risque d’obésité chez les chiens de compagnie. L’étude la plus récente émane d’une équipe de scientifiques danois dirigée par Charlotte R. Bjørnvad au département des sciences cliniques vétérinaires de l’université de Copenhague. Cette étude est un peu différente des autres car elle ne s’est pas seulement intéressée aux caractéristiques spécifiques des chiens, mais aussi à celles de leurs propriétaires. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un échantillon particulièrement important (268 chiens seulement), de nombreuses mesures ont été prises pour décrire chaque animal et son propriétaire, et certaines des conclusions semblent intrigantes, voire potentiellement utiles si nous voulons essayer de contrôler le niveau de poids de nos chiens.
L’une des premières variables étudiées par l’équipe de recherche était l’effet de la stérilisation sur l’obésité. Il a été suggéré que la stérilisation des chiens tendait à augmenter la probabilité de surpoids. Dans cette étude, ce résultat a été confirmé pour les chiens mâles : les mâles castrés présentaient un taux d’obésité beaucoup plus élevé. La stérilisation n’a pas eu d’effet sur les femelles, mais l’âge en a eu, les femelles plus âgées ayant tendance à être beaucoup plus lourdes. La raison de la différence entre les chiens mâles et femelles pourrait bien être liée aux niveaux de testostérone en circulation. Il a été démontré, du moins chez l’homme, qu’un manque de testostérone peut abaisser le taux métabolique, ce qui se traduit par des besoins énergétiques moindres et donc par une plus grande probabilité de prise de poids. La stérilisation a un effet évident en provoquant une baisse des niveaux de testostérone chez les mâles ; cependant, la stérilisation des femelles n’affecte pas leur niveau de testostérone circulante (qui est déjà bas).
L’une des conclusions de cette étude que j’ai trouvée surprenante est que l’horaire d’alimentation des chiens influe sur la probabilité qu’ils deviennent obèses. Les chiens qui n’étaient nourris qu’une fois par jour avaient beaucoup plus tendance à être en surpoids ou obèses que les chiens qui étaient nourris deux fois par jour. Dans cette étude, 14 % des chiens étaient nourris ad libitum (terme scientifique désignant l’alimentation libre, où la nourriture est laissée à disposition en permanence et où le chien peut manger quand il veut et en quantité qu’il souhaite). Ce programme d’alimentation libre a en fait entraîné une légère réduction de la probabilité d’obésité, bien qu’il ne s’agisse pas d’un effet très important et, à mon avis, pas suffisant pour compenser les avantages psychologiques de l’alimentation programmée. C’est au cours de l’alimentation programmée que le chien associe la disponibilité de la nourriture aux actions du propriétaire, au lieu de croire que la nourriture lui est donnée par le sol, comme c’est le cas lors de l’alimentation libre.
Du point de vue d’un psychologue, les résultats les plus intéressants ont peut-être été obtenus lorsque les chercheurs ont évalué l’association entre le poids du propriétaire de l’animal et le poids de son chien. Si nous regroupons les propriétaires minces et de poids normal, nous constatons que la prévalence des chiens lourds ou obèses est de 14 %. Si le propriétaire de l’animal est en surpoids, ce pourcentage double, de sorte que 28 % de ces chiens sont en surpoids. Toutefois, si l’on considère les propriétaires de chiens obèses, ce pourcentage augmente jusqu’à atteindre 35 % de leurs chiens de compagnie qui sont lourds ou obèses.
La raison de cette association entre l’obésité du chien et le poids du propriétaire n’est pas claire, bien que les auteurs suggèrent indirectement que cela pourrait être lié au nombre de friandises données à un chien pendant les moments où le chien et l’homme se détendent simplement. J’en déduis que leur argument est le suivant : le propriétaire a pris de l’embonpoint parce qu’il a tendance à grignoter des friandises pendant les moments de détente (lorsqu’il est assis, regarde la télévision, etc.) et que cette consommation supplémentaire de nourriture fait augmenter son poids. Bien entendu, le chien de la famille reste près de son maître. Dans cette situation, il est probable que le propriétaire se sente un peu coupable de manger alors que son animal ne mange pas, et qu’il récompense le chien avec des friandises non méritées et inutiles sur le plan calorique. Si ce comportement devient habituel, le résultat évident est un chien dodu.
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Références
C.R. Bjørnvad, S. Gloor, S.S. Johansen, P. Sandøe et T.B. Lundc (2019). La castration augmente le risque d’obésité chez les chiens mâles mais pas chez les chiennes – Une étude transversale des facteurs de risque d’obésité liés au chien et au propriétaire chez les chiens de compagnie danois. Preventive Veterinary Medicine, 170, https://doi.org/10.1016/j.prevetmed.2019.104730